C’est une victoire pour les organisations de la société civile : elles sont allées jusque devant les tribunaux pour faire passer cet amendement, et obtenir plus de transparence dans le processus électoral. Pour David Lewis, de l’ONG Corruption Watch, cette mesure de contrôle du financement des partis est essentielle, après toutes ces années de scandales de corruption au sommet de l’État : « Jusqu’à présent, il n’y avait aucun moyen de savoir comment et par qui les partis étaient financés. Les grosses entreprises et les citoyens les plus riches ne donnent pas de l’argent juste pour soutenir la démocratie, ils n’ont pas forcément un stratagème de corruption en tête, mais cela leur offre à accès à ceux au pouvoir, que n’auraient pas un citoyen lambda. Et il faut réfléchir à ce qu’ils peuvent faire avec un tel avantage. » Désormais les dons des individus ou des entreprises de plus de 100 000 rands, soit près de 5 000 euros, doivent être rendus publics. Cela permettra aussi d’avoir une idée plus précise des sommes brassées lors des campagnes selon Grant Masterson, chercheur à l’Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique (EISA) : « On ne sait pas exactement combien les partis politiques dépensent pour leur campagne. Dans le futur, avec la loi, on pourra avoir une idée plus claire de leurs dépenses. Il y a eu des déclarations faites par des cadres de l’ANC, comme quoi plus de 50 millions d’euros ont été dépensés sur une élection, mais il y a eu ensuite des rétractations. Avec cet amendement, nous aurons bientôt plus de transparence sur ces questions. » Mais au sein des partis politiques, on voit cela d’un mauvais œil. John Moodey est l’un des cadres de l’Alliance Démocratique, le principal parti d’opposition : « Cela nous inquiète, car nous dépendons beaucoup des dons des grandes entreprises. Et elles ont peur que la publication de leur don puisse détériorer leur relation avec le gouvernement. Par exemple le gouvernement actuel est une alliance entre les communistes, l’ANC et la plus grosse centrale syndicale du pays. Donc s’il est connu que certaines compagnies soutiennent l’opposition, il y a une possibilité qu’elles soient ensuite confrontées à des mouvements syndicaux au sein leur entreprise. Cette loi va donc diminuer les moyens des partis politiques pour faire campagne. » Certaines ONG regrettent de leur côté que la loi n’aille pas plus loin, en régulant aussi les fonds pour les élections internes des partis. L’année dernière, le président Cyril Ramaphosa a été accusé d’avoir reçu un don d’une compagnie sulfureuse dans sa campagne pour prendre la tête de l’ANC.
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